Echinococcus multilocularis présente un cycle dit hétéroxène c’est-à-dire à plusieurs hôtes, en l’occurrence deux dans ce cas.

                                             Chez les hôtes définitifs

L’identification des hôtes

La forme adulte du parasite est hébergée principalement dans l’intestin des renards (les genres Vulpes et Alopex) mais atteint aussi d’autres carnivores sauvages tels que le loup en Europe, le coyote en Amérique du Nord ou encore le chien viverrin au Japon. Les carnivores domestiques tels le chien (Contat 1984) et plus rarement le chat représentent également un réservoir parasitaire (Eckert 1974, Pétavy et al. 1988, Pétvay et al., 2000).
Les différentes infestations expérimentales réalisées tendent à montrer que le chien est plus réceptif que le chat (8 fois plus), quelque soit la souche utilisée, nord-américaine (Rausch & Schiller, 1954) ou européenne (Vogel, 1957).

La contamination des hôtes définitifs

C’est essentiellement la relation prédateur-proie qui permet aux carnivores de s’infester.

Le développement du parasite

Le développement de la larve de E.multilocularis se divise en 4 étapes : proglotisation, maturation, croissance et segmentation.

On appelle Différenciation Germinale, la phase comprenant la production de proglottis (production de nouvelles unités reproductrices) et la maturation de ces derniers, et Différenciation Somatique, la croissance et la segmentation (strobilisation) des proglottis.
Une vingtaine de jours après l’infection, le ver envahit la crypte de Lieberkühn, portion antérieure de l’intestin grêle. Le rostre, pointe antérieure du métacestode, commence alors son activité sécrétrice, d’origine histolytique ou enzymatique. Ce site de prédilection est un site nutritionnel important. Les sécrétions paraissent avoir plusieurs rôles : d’une part, de faciliter l’attachement du ver, sans quoi ce dernier ne pourrait se développer et d’autre part, la protection contre les enzymes digestives de l’hôte. Les quarante premiers jours, les proglottis (organes reproducteurs) sont produits et se détachent de la paroi tous les 7 à 14 jours. Les oeufs sont produits entre le 28ème et le 35ème jour : chaque proglottis pouvant produire jusqu’à 200 œufs (Thompson et Eckert 1982, Thompson et al. 1983). La sénescence des cellules parasites est observée entre 6 et 20 mois mais elles peuvent rester infectantes jusqu’à 2 ans voire davantage (Schantz 1982). Le segment ovigère (dernier segment) se détache et est éliminé dans l’environnement.
La longévité du ver adulte est de 3 à 4 mois dans l’intestin des carnivores (Rausch, 1954).

L’intervalle de temps entre l’ingestion par l’hôte définitif d’une forme larvée et le rejet par ce même hôte des œufs est appelée période prépatente : elle dure de 28 à 35 jours chez le renard.

                                      Chez les hôtes intermédiaires

L’identification des hôtes

Les rongeurs , principalement des microtidés et arvicolidés (campagnols) sont les hôtes intermédiaires de l’échinococcose alvéolaire. Les hôtes les plus communément infectés sont Microtus arvalis et Arvicola terrestris . (Houin et coll. 1982).

microtus arvalis
et
arvicola terrestris


Plus de trente espèces de rongeurs sont reconnues comme vecteurs possibles mais avec des sensibilités différentes d’une espèce à l’autre (Pétavy et al. 1984) et même entre individus d’une même espèce (Houin et al. 1984). D’autres rongeurs comme la marmotte, le rat musqué (Boussineq et al., 1986) ou encore le castor ont été trouvés infectés mais aux vues des données actuelles, il n’est pas possible de connaître leur rôle dans le cycle épidémiologique du parasite.

M. arvalis est un hôte très réceptif, à la différence d’A.terrestris dont l’hydatide est rarement fertile c’est-à-dire qu’on observe peu de protoscolex. Cependant cette réceptivité moyenne est suffisante pour assurer au parasite un succès fréquent (Houin 1983). On pourrait alors penser que M. arvalis joue le rôle principal dans la contamination au renard. Toutefois le nombre de larves fertiles par campagnols est moins important sur le plan épidémiologique que la fréquence de rencontre avec des proies même peu parasitées (Raoul 2001).
Les résultats de l’étude de Raoul, dans laquelle le système comporte deux espèces proies principales, montrent que l’espèce dont la biomasse est dominante dans l’environnement, A. terrestris, imprime sa dynamique à l’intensité de la transmission (Raoul, 2001).

La contamination des hôtes intermédiaires
Ces derniers se contaminent en ingérant des végétaux souillés par les œufs d’échinocoque libérés avec les fèces des carnivores. Après l’ingestion par l’hôte intermédiaire, les œufs éclosent dans l’estomac et l’intestin grêle. A l’état larvaire le parasite encore appelé métacestode sous cette forme, se rencontre dans différents viscères, foie et poumon surtout, mais aussi rein, rate, os et cerveau.

Le développement du parasite
L’éclosion comprend 2 étapes :
la désagrégation passive de la membrane de l’œuf
(embryophore) dans un premier temps puis l’activation et la libération de l’embryon (oncosphère) contenu à l’intérieur (Lethbridge, 1980).

Les enzymes protéolitiques (pepsine, pancréatine) jouent un rôle dans la décomposition de la membrane de l’œuf, ainsi que les sels biliaires. L’éclosion a lieu dans l’estomac. L’embryon hexacanthe est alors libéré et activé par la bile.

L’oncosphère possède un système glandulaire dont les sécrétions lui permettent d’adhérer à la paroi intestinale et provoquent une nécrose tissulaire. L’oncosphère traverse la barrière épithéliale 30 à 120 minutes après l’éclosion, grâce à ses crochets (Holcman.B, Heath.D.D 1997).

Les phénomènes induisant la pénétration ne sont pas précisément connus : il semblerait que les crochets, les mouvements du parasite et les sécrétions des glandes jouent un rôle.
Les facteurs qui déterminent la localisation finale du cestode ne sont pas encore bien clairs mais probablement liés aux caractéristiques anatomiques et physiologiques de l’hôte. L’oncosphère se développe alors en métacestode, après avoir atteint son site de prédilection.
Très rapidement, il passe par une série de réorganisations (10-14 premiers jours) : prolifération des cellules, dégénérescence des crochets de l’oncosphère, atrophie musculaire, vésicularisation et formation d’une cavité centrale, développement des couches germinale et laminaire.

La longévité de la larve n’est déterminée que par la durée de vie de l’hôte qui l’héberge (maximum d’une année pour les micro mammifères concernés). Cependant, la larve est encore infectante 4 à 8 jours après la mort de l’hôte, ce qui indique donc, qu’un hôte définitif, ingérant un cadavre de plusieurs jours, peut encore se contaminer. Certains auteurs pensent qu’une stratégie de survie du parasite consiste à induire chez l’hôte secondaire, un état de faiblesse permettant plus facilement sa capture (Artois, Giraudoux, communications personnelles 2002).
Chez les hôtes intermédiaires les plus réceptifs, il faut entre 45 et 50 jours pour l’acquisition de la fertilité (Contat, 1984) sans quoi un carnivore ne pourrait être infecté.

                                                  Chez l’hôte accidentel

L’identification des hôtes

L’homme est l’hôte accidentel principal de l’Echinococcose alvéolaire mais on peut constater que le porc (Hokkaido, par Sakai et coll., 1984), le sanglier (Europe), le singe (Europe et Hokkaido) et le cheval (Hokkaido, Miyaushi et coll., 1984) le sont également mais, à moindre échelle.L’échinococcose alvéolaire est appelée aussi hémizoonose ou anthropozoonose car le cycle du parasite s’arrête chez l’homme (l’homme n’étant pas une proie des carnivores).

La contamination de l’homme

Les facteurs de contamination de l’homme ne sont pas clairement établis. Les hypothèses d’infection sont les suivantes :
Indirectement , par des aliments ou une eau de boisson souillés,
Directement, par les œufs de ténia présents dans le pelage des carnivores ou même sur la langue du chien.
Seuls les œufs sont infectieux pour l’homme.

Le développement du parasite chez l’homme
La maladie chez l’homme est due au développement intra-hépatique de la larve d’E.multilocularis. Le développement est comparable à celui d’un cancer. Aux lésions parasitaires s’associent de la nécrose, une intense prolifération granulomateuse réactionnelle, puis une fibrose (Bresson-Hadni, 1997).

Les Cycles épidémiologiques
Pour l’Echinococcose alvéolaire, 3 cycles peuvent être mis en évidence, suivant les hôtes :

                                                                 Le cycle sylvatique :

Le cycle sylvatique implique le renard et les rongeurs sauvages : c’est le réservoir parasitaire des autres cycles. Une trentaine d’espèces de rongeurs ont été impliqués en tant qu’hôtes intermédiaires dans le monde entier, ainsi que plusieurs hôtes définitifs comme le renard, le chien et le coyote.(Houin R, Liance M, 1985)

                                            CYCLE SYLVATIQUE DU TENIA ECHINOCOQUE


ERRATISME DE L’ECHINOCOCCOSE ALVEOLAIRE


                                                        Le cycle synanthropique :
L’homme, hôte aberrant, est  » un cul de sac épidémiologique  » : il est impliqué dans ce cycle avec les carnivores sauvages et domestiques.

                                                         Le cycle domestique :
Il implique les carnivores domestiques, essentiellement le chien et d’une façon plus rare, le chat (Eckert J et al. 1974), ainsi que les micro mammifères sauvages, éventuellement les rongeurs commensaux (Pétavy A.F et al. 1990).

                                                    Conclusion

L’Echinococcose alvéolaire comporte trois maillons épidémiologiques ; un ténia adulte dans l’intestin des carnivores et sa larve dans le foie des rongeurs, reliés par un stade de résistance et de dissémination dans la nature constitué par les œufs du parasite adulte. La parasitose peut être définie comme une zoonose endémique régionale, stable et permanente , à l’origine des cas humains sporadiques. Sa transmission à l’homme est consécutive à la souillure de l’environnement par les déjections des renards parasités ; à ce titre, elle entre dans le domaine des affections liées au  » péril fécal « .

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